Le match entre les terminaux PC, tablettes et smartphones contre les téléviseurs est lancé.
La convergence avec sa panoplie de services bouleverseront tout l’écosystème y compris au niveau de la réglementation. Faudra t-il envisager une instance de régulation unique pour gérer à la fois la convergence entre télécommunication et audiovisuel ou encore entre le contenu et le contenant ?
A moins d’une semaine de la coupe d’Afrique des nations (CAN 2012), l’opérateur Orange annonçait le lancement de son service TV sur mobile. Un service qui propose l’accès aux programmes de télévision sur un terminal portable. Une évolution dans la fourniture de contenu en Afrique où la tradition reste encore confinée à la télévision analogique terrestre. Malgré la nécessité et l’imminence de la migration vers la TNT [télévision numérique terrestre] qui propose est un mode de diffusion terrestre de la télévision, dans lequel les signaux audio, vidéo et de données, sont numérisés puis ordonnés dans un flux unique. « On parle alors de multiplexage, avant d’être modulés puis diffusés, c’est-à-dire transportés jusqu’au téléspectateur via les ondes électromagnétiques », explique un expert de la TNT.
L’arrivée prochaine de ce nouveau service audiovisuel risquera de poser la problématique du régime juridique envisageable pour ce mode communication. La question de savoir sur quel régime juridique dépendront ces nouveaux services reste entière. Relèveront-ils de la communication audiovisuelle ou des services de communications ? Il pourrait y avoir conflit d’intérêt entre les Agences de régulation des télécommunications et le Conseil Supérieur de l’audiovisuel.
Pour trancher sur cette question, en l’Europe, la plupart des États membres de l’UE considère que « l’ensemble des services fournis sur appel individuel, tels le paiement à la séance et la vidéo à la demande, échappent au champ d’application de la directive Télévision Sans Frontières ». La TSF représente la pierre angulaire de la politique audiovisuelle de l’Union européenne. Fondé sur deux principes, la directive Télévision Sans Frontières promeut « la libre circulation des programmes télévisés européens au sein du marché intérieur ; et l’obligation, pour les chaînes de télévision, de réserver, plus de la moitié de leur temps d’antenne à des œuvres européennes », explique un expert de l’UE. Il s’agit bien de quotas de diffusion juridiquement assimilables aux services disponibles sur Internet ou aux services télématiques soumis à simple déclaration, estime un rapport publié par la Commission européenne.
Le match entre TV vs PC est lancé
En revanche, ces services audiovisuels appelés aussi services mixtes ont une dimension d’ordre économique et culturel, estime pour sa part le droit français. Ils ne peuvent donc être assimilés à Internet dont le régime juridique est relatif au droit pénal international et très orienté vers la protection du droit d’auteur. Comme en Europe, cette nouvelle donne posera aussi en Afrique les mêmes problèmes à savoir si les services fournis seront réellement identiques ? Ou encore de savoir si le « téléspectateur » regardera indifféremment son match de football à la télévision ou sur son ordinateur, sur son smartphone ou sur sa tablette ?
Il y aussi la question de la qualité du service offert sur le Web et le mode de diffusion. S’agira t-il d’un mode de consommation individuel ou collectif ? Pour l’heure, il est encore trop tôt pour en juger. Il pourrait s’agir d’une évolution graduelle de la réglementation sachant que la qualité et le cible des supports ne sont pas les mêmes entre le web et les autres supports de diffusion comme le câble, le satellite ou encore le réseau hertzien.
A ce jour, très peu d’États ont mis en place des instances de régulation uniques dans les secteurs audiovisuels et de télécommunications. « Ces deux modes de diffusion suivent des logiques et des objectifs historiquement différents et fonctionnellement : l’un met en place un système décentralisé de communication, l’autre organise un mode de diffusion plus ou moins décentralisé où l’idée de contenu l’emporte sur celle de transport, car la composition du fluide importe plus que le tuyau », estime un rapport de l’UE.
En tout état de cause, il sera difficile de concilier une réglementation orientée vers des objectifs économiques et techniques, en ce qui concerne les réseaux de télécommunications, et une réglementation relevant de la liberté d’expression et de la création culturelle pour les réseaux audiovisuels. Ce sont en effet deux types de régulation très différents, voire opposés.
Mohamadou Diallo
(Source : Réseau Télécom Network n° 52, 15 avril 2012)