Comme dans d’autres pays africains, au Bénin, il faudra payer cher pour se connecter à Facebook
dimanche 9 septembre 2018
Le Bénin, comme plusieurs autres pays africains avant lui, vient d’introduire une taxe sur l’utilisation des réseaux sociaux comme Facebook ou Whatsapp. Désormais l’accès des internautes à ces services coûtera beaucoup plus cher.
L’accès à Facebook ou à Whatsapp devrait coûter de plus en plus cher au Bénin. Selon un décrét daté du 25 juillet mais rendu public fin août, le gouvernement a décidé de l’imposition d’une taxe de 5 francs CFA [soit 0,007 centimes d’euros] par mégaoctet pour l’accès aux services over-the-top (OTT).
Les services OTT ou services de contournement en français, sont l’ensemble des services qui permettent de transporter des flux audio, vidéo ou des données Internet sans l’intervention d’un opérateur de téléphonie traditionnel. Il s’agit de sites d’échanges utlisant la technologie VoIP (Voix sur IP) comme Whatsapp, Facebook, Skype, Viber, mais aussi de Youtube.
Cette nouvelle taxe sur les offres Internet des deux opérateurs de téléphonie mobile du pays (le sud-africain MTN et Moov, filiale du groupe émirati Etisalat) sera reccueillie par ces derniers et reversé à l’État. Selon le gouvernement béninois, la mesure vise à compenser les pertes financières des entreprises de télécommunication face à l’essor en Afrique des plateformes d’échanges qui concurrencent désormais les services traditionnels voix et SMS des opérateurs. « Nous sommes dans un modèle où la valeur du secteur chute. Les entreprises du Télécom perdent de l’argent, l’État perd de l’argent », a justifié le ministre béninois de l’Économie et des Finances, Romual Wadagni.
Internet à deux vitesses
Mais cette nouvelle disposition a provoqué une levée de boucliers dans le rang des associations de la société civile et suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux. Surtout à l’annonce des nouveaux tarifs de l’opérateur de téléphonie Moov validés par l’Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep). À titre d’exemple l’offre Internet avec réseaux sociaux de 2 gigaoctet coûterait 15 000 francs CFA [environ 23 euros] contre 4 000 francs CFA [environ 6 euros] pour l’offre Internet sans réseaux sociaux. En clair, un Internet à deux vitesses.
« Nous sommes contre cette mesure du gouvernement qui va exclure du marché de l’accès à Internet et aux réseaux sociaux des personnes qui n’ont pas les moyens de payer des tarifs aussi chers », a affirmé Franck Kouyami président du Forum sur la gouvernance de l’Internet (FGI) au Bénin et porte-parole d’un regroupement d’associations de la société civile, contacté par France 24. Il ajoute : « cette mesure va à l’encontre du sacro-saint principe de la neutralité du Net [qui oblige les opérateurs à proposer des formules tarifaires indifférenciées pour l’accès à l’ensemble des flux de données Internet] ».
Une campagne de boycott des pages institutionnelles du gouvernement béninois sur Facebook et Twitter avec le hashtag #TaxePasMesMo a été lancée pour dénoncer la mesure jugée liberticide par Amnesty International : « Amnesty International s’inquiète de la restriction de la liberté d’expression qui est orchestrée par le biais de ce décret », a déclaré Amnesty Bénin sur son compte twitter.
Hermann Boko
(Source : France24, 9 septembre 2018)