Coalition Orange-Total : Les pétroliers sénégalais dénoncent un néocolonialisme
samedi 20 septembre 2014
L’ingérence de l’opérateur de téléphonie Orange dans le secteur pétrolier n’est pas pour plaire aux acteurs du secteur pétrolier. Ces derniers accusent l’opérateur de téléphonie d’avoir offert un avantage concurrentiel déloyal à Total au détriment des autres sociétés concurrentes.
Les pétroliers nationaux ne sont pas contents de la démarche de l’opérateur de téléphonie, Orange, qui, accusent-ils a déstructuré le secteur depuis le début de l’année 2014. Conséquence, ces derniers sont, au cours d’un point de presse, montés au créneau pour attirer l’attention des autorités afin que cessent les pratiques discriminatoires de l’opérateur français. Pis, ce comportement d’Orange qu’ils jugent irresponsable menace l’équilibre de la profession et subséquemment de l’économie nationale. Et pour cause, ils pensent que le secteur pétrolier occupe une place importante dans l’économie. D’où la nécessité, selon eux, de mener un combat du peuple dans son ensemble contre les agissements de l’opérateur de téléphonie.
Les acteurs pétroliers accusent Orange d’avoir commis un déni à l’expertise locale et aux droits fondamentaux de la libre concurrence. Selon eux, si un certain silence perdure, les agissements de l’opérateur risquent de sonner le glas des entreprises sénégalaises de la distribution pétrolière. L’association dénonce cet état de fait en se basant sur l’accord de partenariat signé entre l’opérateur Orange et Total Sénégal, résultat d’un co-branding. Les clients des stations-service Total payant leurs achats par Orange Money, bénéficient d’un bonus de recharge automatique de 10 % de la valeur des achats effectués. Ce bonus, renseignent-ils, était initialement plafonné à 5 mille francs Cfa jusqu’en fin juin. Actuellement, il est ramené à 2 mille francs Cfa. Cela, nonobstant la faculté laissée aux clients de fractionner leurs achats pour continuer à bénéficier des avantages. Par conséquent, s’offusquent-ils, Total accroit ses ventes de 16 % là ou tous ses autres concurrents sénégalais peinent à atteindre ou stagnent à 9 %. Car, les clients qui achètent chez Total bénéficient d’un bonus de crédit téléphonique équivalent à 2,5 fois la marge du distributeur qui est de 34,96 francs Cfa, hors transport et passage. En clair, les pétroliers relèvent que l’opérateur Orange donne à Total un avantage concurrentiel indu que la structure des prix ne peut lui offrir. Et, de rappeler qu’au Sénégal, les prix des carburants sont fixés par l’Etat suivant arrêté ministériel, faisant de la structure du prix des hydrocarbures une loi. Selon Ameth Guissé, président de l’association, une telle entente est contraire au principe de la libre concurrence et exige de l’opérateur de téléphonie de mettre un terme à cette pratique « discriminatoire » dans le secteur des hydrocarbures.
Cette pratique, notent-ils, ne saurait être initiée dans le pays d’où sont issues les maisons mères des sociétés multinationales incriminées opérant au Sénégal. Dans le même d’ordre d’idées, Ameth Guissé dénonce aussi l’attribution à Total par Eiffage-Senac du site d’implantation de la station-service de l’autoroute à péage. « Pour l’édification d’une station sur cet axe, Eiffage-Senac a choisi Total suivant un appel d’offres limité aux seules sociétés étrangères. Le critère retenu est la dimension internationale. C’est dire qu’aucune société sénégalaise n’a été invitée à soumissionner », regrette-t-il. Non sans préciser que l’autoroute à péage est une vitrine du Sénégal et à ce titre, elle doit être ouverte à toutes les entreprises y compris celles détenues par des Sénégalais. Sous ce registre, ils estiment que l’Etat doit avoir un droit de regard sur les affectations des sites, car les terres restent une propriété de l’Etat. Les pétroliers demandent l’arrêt d’octroi des sites à Total pour l’extension de son réseau et exigent le démantèlement de certains de ces sites au profit de la concurrence.
Dans notre édition d’hier, Momar Nguer, Directeur Afrique et Moyen-Orient de la branche Marketing et services de Total, a soutenu qu’il n’est pas interdit à une entreprise privée de contracter avec une autre. « Parce que je suis une entreprise française, je ne dois pas répondre à une offre d’une autre société étrangère qui cherche un partenaire ? », s’étonnait-il.
Adama Coulibaly
(Source : Wal Fadjri, 20 septembre 2014)