Après plus d’un mois d’enseignement supérieur en ligne : Les étudiants dressent un bilan ‘’catastrophique’’
mercredi 10 juin 2020
Plus d’un mois après la décision de continuer l’enseignement supérieur à distance, à cause de la pandémie, les étudiants dressent un bilan ‘’catastrophique’’ de la mise en œuvre de cette mesure. En conférence de presse hier, le Collectif des étudiants de l’université Cheikh Anta Diop (Ucad) a dénoncé une mesure discriminatoire et a invité le ministre de tutelle à impliquer les étudiants dans la recherche de nouvelles solutions pour sauver l’année académique.
Pour assurer la continuité de l’enseignement supérieur, en dépit de la pandémie du coronavirus, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avait proposé comme solution les cours à distance. Ainsi, plus d’un mois après le début de ces cours via le numérique, le Collectif des étudiants de l’Ucad fait le constat d’une mesure discriminatoire, en ce sens que tous les étudiants n’arrivent pas à suivre correctement les enseignements fournis, à travers les différentes plateformes mises en place à cet effet. Pour cause, nombre d’étudiants résident dans certaines zones enclavées du pays et éprouvent d’énormes difficultés pour accéder à la connexion et même à l’électricité.
Il s’y ajoute le manque de matériels tels que les machines et les smartphones nécessaires pour les cours en ligne. En conférence de presse, hier, devant le hall du pavillon A de l’Ucad, le collectif des amicales dudit établissement a dénoncé cette situation et invité le ministre de tutelle à impliquer les étudiants dans la recherche de solutions pour sauver l’année académique. ‘’Les amicales de l’Ucad fustigent la démarche irrespectueuse, irresponsable, irréfléchie et individualiste du ministre Cheikh Oumar Hann qui s’entête à faire la continuité des cours en ligne sans des mesures d’accompagnement. Pire, les représentants des étudiants n’ont été associés dans ce processus qu’à titre informatif. Et nous pensons qu’en tant que premiers concernés, nous connaissons mieux que quiconque la situation’’, a soutenu Abdoulaye Cissé, étudiant en Master 2 en sciences politiques à la faculté de Droit, par ailleurs Président de l’amicale de ladite faculté.
‘’Cela fait presque trois mois que l’Etat du Sénégal a pris la décision de fermer toutes les universités. Le ministre Cheikh Oumar Hann a décidé, à cette occasion, de la continuité des cours à distance, sans pour autant consulter les étudiants qui sont les premiers concernés. Il faut savoir que notre pays n’est pas en mesure de mettre en place l’enseignement à distance et que cela profite à tout le monde. Les conditions sont loin d’être réunies pour ce basculement vers le digital. Dans certains villages enclavés du pays, il n’y a même pas d’électricité, a fortiori Internet. Chaque jour, on reçoit des appels et des messages de nos camarades qui nous font part de leurs soucis pour accéder aux plateformes dédiées aux cours’’, renchérit son camarade Pape Abdoulaye Touré, Président de la commission chargée des relations extérieures de l’amicale.
L’autre problème, s’empresse-t-il de souligner, est que les autorités n’ont pas voulu subventionner la connexion, encore moins outiller les étudiants pour qu’ils puissent suivre normalement les cours à distance. ‘’Nous ne pouvons pas, en tant que représentants des étudiants, cautionner cette situation et nous allons nous battre pour défendre les intérêts matériels et moraux de nos camarades, parce que nous sommes là pour ça. Le ministre devait, en premier lieu, nous consulter, parce que même étant jeunes, cette question nous concerne en premier, car il s’agit de notre avenir. Aucune amicale de faculté n’a été saisie par le ministère de tutelle, avant la prise de cette décision. Ce qui constitue un manque de respect notoire vis-à-vis des étudiants’’, a-t-il martelé.
Les solutions des étudiants pour sauver l’année académique
Ainsi, pour sauver l’année académique, les jeunes étudiants proposent aux autorités de les accompagner avec des supports en papier, en collaboration avec les représentants des amicales dans les communes et les conseils communaux de la jeunesse. Ils ont également souligné la nécessité de tenir, une fois les universités rouvertes, des séances de cours et de travaux dirigés (TD) en présentiel avec des horaires réduits. Ce, avant la programmation des examens. Ils n’accepteront jamais, ont-ils insisté, de reprendre les enseignements présentiels, en faisant directement des examens.
‘’Nous invitons le ministre Cheikh Oumar Hann à nous impliquer dans le processus, s’il ne veut pas que l’université s’embrase. Il nous faut une solution qui fera que tous les étudiants puissent participer aux cours, quel que soit le format retenu. Nous ne voulons pas une rupture d’égalité entre les étudiants dans l’utilisation du service public de l’enseignement supérieur’’, a terminé Pape Abdoulaye Touré.
Abba Ba
(Source : Enquête, 10 juin 2020)