Après le camouflet du régulateur des marchés boursiers, les recours offerts à France Télécom et à l’Etat du Sénégal
samedi 11 avril 2009
Qu’est-ce qui a fait basculer la décision du Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (Crempf), et l’a incité à bloquer la transaction entre les deux parties ? En lisant la section 3 du règlement du gendarme de la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm), on trouve les points dérogatoires aux transactions sur dossier, qui est une opération qui se fait en dehors du marché boursier, comme ont voulu le faire l’Etat et son partenaire France Télécom. Il en ressort, entre autres, un point (iii), qui prévoit que : « Une transaction sur valeur peut se faire sur dossier lorsque la transaction met en cause une personne morale autre qu’une société et une société, alors que la personne morale détient directement, au moins, un tiers du capital de la société. » Sur ce point, des spécialistes ont fait comprendre que l’Etat, personne morale qui aliène, ne détient pas le tiers du capital, ce qui est motif au rejet.
Un autre point aussi important, et qui peut avoir justifié la décision du Crempf de casser la transaction, est le prix convenu. Un autre spécialiste des marchés boursiers explique : « L’inconvénient d’une transaction sur dossier est que, les autres investisseurs sur le marché voient une transaction leur passer sous le nez, alors qu’eux étaient, depuis longtemps, soit vendeurs ou acheteurs. » En d’autres termes, et parlant de l’action Sonatel, dont le cours hier, était d’environ 116 000 francs Cfa, alors que l’Etat a pu vendre à 156 000 francs Cfa. L’inconvénient est qu’il pouvait y avoir d’autres détenteurs d’actions Sonatel, qui proposaient peut-être 120, 130, ou même 145 000 francs Cfa. Ces derniers peuvent se demander, pour quelle raison France Télécom a préféré acquérir des actions plus chères alors que les leurs étaient disponibles depuis fort longtemps.
Devant le refus du Crempf d’avaliser une transaction faite hors du marché, les deux partenaires pourraient recourir à une Offre publique d’achat (Opa), lancée par France Télécom ou une Offre publique de vente (Opv), lancée par l’Etat.
Quel que soit le préjudice que ce revers pourrait porter à l’Etat, dans sa recherche de liquidités, beaucoup d’observateurs considèrent que l’intégration régionale, et la réputation du marché régional des valeurs vont en sortir renforcées. Autrement, les investisseurs internationaux qui opèrent sur la Brvm, ne seraient pas rassurés de voir qu’il se fait des passe-droits, au bénéfice de certains et pas d’autres. Le marché avait besoin de montrer qu’il règne en son sein, une certaine équité, afin de renforcer son intégrité et sa réputation. « Il faut que le marché puisse permettre à tous les acteurs présents sur le marché, de bénéficier des opérations qui s’y déroulent », ajoutent les observateurs.
Mohamed Guèye
(Source : Le Quotidien , 11 avril 2009)