Après avoir perdu son procès contre le BSDA : le groupe Walf contraint à payer un million par jour de retard
vendredi 12 février 2010
Le 28 janvier dernier, la justice a rendu son verdict dans l’affaire opposant le Bureau sénégalais du droit d’auteur (Bsda) au groupe de presse Walfadjri. Ce dernier refusait de payer les redevances qu’il devait au premier à travers l’exploitation des œuvres protégées des artistes. En refusant de produire ses états financiers et la puissance de ses émetteurs au Bdsa, suite à l’ordonnance du juge qui lui a été signifiée le 2 février 2010, Walfadjri est sous astreinte de payer un million par jour de retard. Hier, le cumul était de 9 millions FCfa.
Me Baba Diop, coordinateur des conseils du Bureau sénégalais du droit d’auteur (Bsda), a révélé, hier, lors d’une rencontre avec la presse au Café de Rome, qu’à la date du 11 février 2010, le groupe Walfadjri est sous astreinte de payer 9 millions FCfa pour non exécution d’une ordonnance juridique reçue depuis le 2 février dernier. « L’histoire nous a donné raison car la justice a rendu une décision favorable au Bsda après avoir constaté la violation par Walfadjri des dispositions des règles du droit d’auteur par une exploitation illicite des œuvres du répertoire protégé », a déclaré l’avocat. Selon les conseils du Bsda, le groupe de presse voulait jouer à cache à cache avec la société qui gère les droits d’auteur au Sénégal en refusant de remettre ses états financiers. Et, finalement, le juge des référés du Tribunal régional hors classe de Dakar a rendu la décision suivante : « Après avoir constaté, d’une part, la violation par le groupe Walfadjri des dispositions des règles du droit d’auteur par une exploitation illicite des œuvres du répertoire protégé ; et, d’autre part, reconnu la qualité du Bsda à assurer la protection desdites œuvres, le juge des référés a vidé le délibéré en déclarant la constitution des avocats du groupe Walfadjri irrecevable (...) et ordonne à ce dernier de produire ses états financiers et la puissance de ses émetteurs au Bsda sous astreinte d’un million FCfa par jour de retard... ».
Ce verdict a été rendu lors de l’audience du 28 janvier 2010, suite à la requête aux fins d’être autorisé à assigner à bref, introduite par le Bsda contre le groupe Walfadjri (Walf Fm, Walf Fm2, Walf Fm3, Walf Tv). Avant la signification de cette décision de justice, le 2 février dernier, le groupe Walfadjri avait procédé, en date du 1er février 2010, par voie d’huissier, à la notification d’un document recensant partiellement les données requises pour la délivrance de l’autorisation légale au titre du droit exécutif de radiodiffusion. Cependant, selon les avocats du Bsda, Walfadjri, au lieu de remettre tous les documents sur les périodes de 2004 à 2009, en ce qui concerne Walf Fm, et de 2007 à 2009 pour Walf Fm 2, Walf Fm 3 et Walf Tv, s’est contenté de délivrer au Bsda des documents partiels de 2007 à 2008. « Nous considérons que l’ordonnance est partiellement exécutée, donc le groupe de presse va verser 9 millions FCfa au Bsda à la date d’aujourd’hui (hier, ndr) », a expliqué Me Baba Diop. Selon la directrice du Bsda, Mme Abibatou Siby, Walfadjri a délibérément refusé de fournir les états financiers de 2004 à 2006 et n’a fourni que ceux de 2007 à 2008. Ainsi, sa structure est incapable de savoir ce que doit payer ce groupe de presse, car pour cela, il lui faut disposer de la comptabilité allant de 2004 à 2009. Mme Siby avait à ses côtés Aziz Dieng, président du Conseil d’administration du Bsda. Selon ce dernier, il faut que les artistes vivent du fruit de leur création. « Ce qui se passe avec Walfadjri est inadmissible et nous ne l’accepterons pas. Si nous perdons ce combat, alors il ne nous reste qu’à abandonner le Bsda. Nous ne reculerons pas et allons mener ce combat jusqu’au bout », a martelé M. Dieng.
Pour Me Baba Diop, cette décision de justice est historique car elle a été prise « par un juge courageux, conscient du rôle du Bsda et des missions qui lui sont dévolues ». Il estime que l’autre enseignement à tirer du verdict, c’est la reconnaissance du caractère sacré de la propriété intellectuelle et l’obligation légale de solliciter l’autorisation des ayants droit pour toute exploitation publique de leur propriété. Présents à la conférence de presse, les artistes Khar Mbaye, Soda Mama Fall, Dial Mbaye, Seune Sène, Samba Diabaré Samb... ont improvisé un « khawaré » (fête populaire), avec comme refrain l’hymne de la jeunesse « Niany bagn na » pour se féliciter de cette décision de justice. « On ne peut pas exploiter les œuvres des créateurs sans verser de redevances. C’est une injustice qui ne peut pas prospérer », a martelé Samba Diabaré Samb qui a invité tous les artistes à l’unité autour de cette question afin de permettre aux créateurs de vivre de leur art.
Maké Dangnokho
(Source : Le Soleil, 12 février 2010)