Annulation du décret sur la surtaxe et le contrôle des appels entrants au Sénégal : Wade cède finalement à Sonatel, mais mystère sur les milliards captés par Global Voice
samedi 20 novembre 2010
La Cour suprême n’aura finalement à trancher la bataille entre l’Etat via l’Artp et la Sonatel. En effet, le chef de l’Etat a annulé le décret portant surtaxe sur les appels internationaux entrants et confiant en même temps leur contrôle et gestion à la société américaine Global Voice Group.
L’annonce du recul de l’Etat a été donnée par la Rts ce samedi, au lendemain de l’audience que le président de la République Abdoulaye Wade a accordée au directeur général de la Sonatel Cheikh Tidiane Mbaye, nommé le jour même Président du conseil d’administration de la Senelec (société nationale d’électricité). Coïncidence ?
Pourtant que de polémiques sur ce contrat entre l’Agence de régulation des télécommunications (Artp) et la Sonatel. Celle-ci avait été déboutée il y a quelques jours de saisine de la Cour suprême dans le but de faire suspendre la circulaire de l’Artp appliquant le contrôle et la gestion par Global Voice Group des appels entrants. Outre d’estimer que ce texte constitue une menace pour les intérêts de la Sonatel, les dirigeants de la société affirmaient que la demande des détails des communications (numéro appelant, numéro appelé, date, heures, etc.) stipulé par le décret serait une grave remise en question de secret de la correspondance. « C’est donc un contrat qui viole l’espace privé du citoyen », soutenait en fin juillet 2010 le directeur de la Règlementation et des affaires juridiques de la Sonatel, Seydi Ahmed Sy Sarr.
Depuis lors, par défiance à la mesure, la société de télécoms sénégalaise (mais avec une majorité pour France Telecom un peu plus 44%) avait refusé l’accès de l’Artp et de Global Voice à ses locaux. L’Agence de régulation a en représailles infligé une la société résistante une amende de 5 milliards francs Cfa. Les sanctions prévues par le texte règlementaire peuvent aller jusqu’au retrait de la licence d’exploitation.
En fait, la Sonatel avait introduit un second recours pour faire annuler le décret confiant à l’Artp le contrôle et la gestion des appels internationaux entrant et instituant une surtaxe sur ceux-ci. « Ce recours en est cours d’examen », indiquait encore il y a quelques jours l’avocat de l’Etat, Me Demba Ciré Bathily. La décision de la juridiction suprême maintenait alors de fait le statu quo concernant la surtaxe sur les communications extérieurs entrantes imposée par le décret. En conséquence, la Sonatel avait menacé d’augmenter le prix des appels sortants du Sénégal, en réponse au principe de réciprocité brandi par des opérateurs étrangers partenaires.
Mais ce qui révulsait le plus la Sonatel, c’est que l’Artp ait confié la gestion contrôle des appels extérieurs entrants à la société Global Voice Group à travers un contrat qui a été pourtant cassé par l’Autorité de régulation des marchés publics pour irrégularité (Armp). Toutefois, l’Artp avait saisi la Cour suprême pour attaquer la décision de l’Armp. Pour ne rien arranger au conflit, la Sonatel a porté plainte pour diffamation contre le patron international de Global Voice Group, Laurent Lamotte, et ce dernier a, à son tour, saisi la justice pour le même motif contre l’un des dirigeants syndicaux des travailleurs de la société de télécoms sénégalaise, Mamadou Aïdara Diop.
Quid des milliards récoltés et de Global Voice ?
Hormis cette bataille à caractère privé, l’enchevêtrement de contentieux juridiques est maintenant caduque après l’arbitrage ( ?) de Wade en faveur vraisemblablement de Sonatel. Reste à savoir qu’adviendrait de Global Voice Group. Cette société ayant engagé des investissements pourrait attaquer l’Etat du Sénégal pour rupture abusif de contrat. A moins que l’Etat et l’Artp, qui avance avoir récolter des milliards sur la surtaxe les cède à Global Voice en guise de dommages et intérêts. Et Wade et le directeur général de l’Artp, Ndongo Diaw auraient alors spolié impunément les consommateurs sénégalais et enrichi, comme depuis 2000, une caste de prédateurs nationaux et leurs amis étrangers.
(Source : Sen24heures, 20 novembre 2010)