André Lucas, expert en droit d’auteur : « Les artistes se sentent exproprier avec le Net »
samedi 22 septembre 2007
S’il est vrai qu’avec Internet les artistes peuvent facilement faire découvrir leurs œuvres de par le monde, il n’en demeure pas moins que cet environnement numérique leur porte un réel préjudice, lié au droit d’auteur.
Les menaces que constitue la piraterie sur l’industrie musicale semblent dépassées aujourd’hui par celles que fait peser Internet sur la protection du droit d’auteur et des droits voisins. L’avis est du Pr André Lucas, expert en droit d’auteur, présent à Dakar pour la formation des acteurs de la musique sur les questions juridiques. Une session initiée par l’Association des métiers de la musique, la Coalition interprofessionnelle des producteurs et éditeurs de phonogrammes du Sénégal et l’Unité de gestion des projets de promotion des investissements.
Selon le Pr Lucas, les auteurs se sentent exproprier de leurs œuvres avec le Net. André Lucas, qui s’exprimait jeudi dernier lors de la restitution des travaux de cette session, tenue à Mbour du 15 au 19 septembre, estime que « tout le monde télécharge les œuvres des artistes sans souci. Chacun va dans un site et prend l’œuvre de son choix ».
Ce phénomène, qui touche les pays développés ou sous-développés, dit-il, est un problème difficile à résoudre. Même si, remarque l’expert, il y a quelques solutions à travers la technique, avec notamment des sites verrouillés où il est impossible d’effectuer des téléchargements illicites.
Au-delà de cette problématique liée à l’Internet, il y a aussi d’autres questions liées à la rémunération pour copie privée. Celle-ci est destinée à compenser le préjudice que subissent les auteurs, les interprètes et les producteurs du fait de gens qui, séduits par leurs musiques, en font des cassettes.
« Tout en espérant qu’au Sénégal avec le vote de la loi sur la propriété littéraire et artistique cela va marcher, il faut, pense André Lucas, que les artistes perçoivent une rémunération sur les supports vierges et sur les appareils d’enregistrement ». Mais, soutient le Pr Lucas, ces appareils ne doivent pas subir un contre-coup à travers une augmentation de leurs prix, car on tenterait de dire que c’est une menace pour l’industrie des équipements. Selon l’expert français, le total de ces redevances pourrait, si cela est bien géré, constituer des sommes importantes dont les artistes interprètes ont besoin pour vivre. Dans un pays comme la France, rapporte-t-il, les artistes interprètes vivent beaucoup de ce type de rémunération, surtout les musiciens d’orchestre.
Fatou K. Sène
(Source : Wal Fadjri, 22 septembre 2007)