Amadou Makhtar Ba Pdg de African Initiative Media : « Je ne vois pas la presse papier disparaitre »
jeudi 8 novembre 2012
En prélude au Forum des leaders des médias africains qui se tient à Dakar du 7 au 9 novembre, le PDG d’African Media leaders AMI, nous a accordés un entretien à Dakar. Amadou Maktar Bâ décline les différents programmes de AMI et démontre que l’avènement de la presse en ligne n’est nullement une menace pour la presse papier. Par contre la presse papier devrait plutôt s’adapter.
Amadou Makhtar Ba, vous êtes le PDG d’African initiative Media (AMI) qui tient un de ses programmes phares du 7 au 9 novembre à Dakar. Qu’est-ce qui a inspiré la création d’une telle institution
C’est parti d’un constat simple. C’est que dans le paysage médiatique africain, si vous prenez les 54 pays du continent, nous sommes tous confrontés au même challenge. Nous sommes des médias qui fonctionnons dans un espace qui, sur les plans économique et des libertés publiques, est assez difficile. Pourtant, c’est dans cet espace-là qu’on a besoin de plus de médias parce que pour moi, les médias doivent être au service du développement et de la transformation économique. Et c’est pour cela que nous nous sommes dit qu’il était important de mettre en place un noyau dur de patrons des médias du continent, pour qu’ensemble, on puisse travailler à relever le défi de l’amélioration du paysage médiatique du continent.
AMI est mise en place en 2008. Quatre ans après, quels sont les résultats obtenus ?
D’abord si on veut bien parlez de chiffres, on a commencé en 2008 avec 55 participants, l’année dernière on était 350 en Tunisie. Cette année, on est déjà 408 personnes inscrites. Donc en termes de chiffres, on en train de ‘’grossir’’. En termes d’impact, on a lancé des programmes dans le domaine de l’éthique et du leadership dans le continent. On a lancé des programmes dans le domaine de l’innovation technologique avec des prix annuels d’un million de dollars US pour l’innovation dans le domaine des médias. Et je pense que c’est un mouvement qui est en train d’avoir un impact dans le continent. Vous savez, ce qui était difficile, c’est d’avoir des patrons des médias qui puissent venir se mettre ensemble pour pouvoir relever les challenges du développement et de l’amélioration de l’environnement de l’espace médiatique dans le continent. C’était ça le challenge qui était difficile. Mais une fois que nous sommes venus ensemble, on a vu au fil des années, qu’on a plus d’impact. Vous vous rendez compte, il a plus de 400 personnes pour cette édition. Il y a le vice-Premier Ministre de Turquie qui vient. Donc ça veut dire que ce mouvement-là, prend de l’ampleur. Tant que nous serons ensemble et travaillerons ensemble, on pourra toujours aller de l’avant.
« Pour des raisons de transparence, il est évident que si on respecte son audience, on doit pouvoir être transparent et donc dire que : « moi tel organe de presse voici ma ligne éditoriale ». Et si on veut faire un parti pris politique, dire clairement voici la raison ou voici les rasions pour lesquelles je suis de telle obédience politique ».
Vous parlez de l’innovation technologique. Justement, comment entrevoyez-vous l’avenir de la presse papier avec l’avènement de la presse en ligne, des blogs… ?
Je pense que c’est un avenir pour moi qui va de pair avec l’avenir des Nouvelles technologies de l’information et de la communication. Je ne vois pas, pour être clair, je ne vois pas la presse, donc le papier disparaitre. Je ne le vois pas. Je vois par contre que la presse va se développer avec l’adaptation technologique. C’est-à-dire qu’il faut que le support papier puisse de plus en plus utiliser les supports électroniques, pour pouvoir toucher beaucoup plus de monde. Vous savez quand vous sortez par exemple, votre journal Le Pays au quotidien, il est lu à Dakar. Mais combien de temps ça prend pour qu’il soit vu à Ziguinchor ou à Kédougou ? Alors qu’avec les TIC (technologie de l’information et de la communication), on peut utiliser le téléphone mobile par exemple pour que les habitants de ces contrées lointaines puissent recevoir une partie du journal ou des extraits au même moment que le support papier se vend dans la rue. C’est ça l’avenir. Ce n’est pas simplement que les médias supports papiers vont disparaitre non. Je ne le crois
Est-il nécessaire à votre avis que les medium africains essaient de redéfinir leurs lignes éditoriales en précisant, notamment leur position par rapport aux acteurs de la vie politique, voire des partis, pour des raisons de transparence ?
Ecoutez, je pense que pour des raisons de transparence, il est évident que si on respecte son audience, on doit pouvoir être transparent et donc dire que : « moi tel organe de presse voici ma ligne éditoriale ». Et si on veut faire un parti pris politique, dire clairement voici la raison ou voici les rasions pour lesquelles je suis de telle obédience politique. Je pense que ça, c’est le principe de transparence. Regardez aux Etas Unis avec l’élection présidentielle, c’est ce qui se passe là-bas.
Pouvez-vous revenir un peu sur les programmes d’African Media Initiative (AMI) ?
Nous avons différents programmes à AMI à savoir un programme sur l’éthique et le leadership parce que nous pensons qu’il est important que les patrons des média puissent observer l’éthique mais également aient le sens du leadership. Deuxièmement nous avons des programmes dans le domaine de l’innovation technologique, on en a parlé tout à l’heure. Troisièmement on des programmes dans l’accès au capital. C’est important pour des entreprises de presse de pouvoir accéder à un capital parce que sans capital, on ne pas avoir les moyens de faire son travail et d’être crédible. Quatrièmement on a un programme qui est la mise à niveau, c’est-à-dire, la gestion du savoir pour les patrons de presse. Et cinquièmement, on a notre conférence annuelle African Media leaders Forum (AMLF) qui est un programme important qui regroupe tous les ans les leaders, les patrons des médias à travers le continent.
Qui finance African Media Initiative ?
Nous sommes financés par différentes organisations. C’est par exemple KKK network, la Fondation Bill and Melinda Gâte, la Fondation Mo Ibrahim, NORA, la coopération norvégienne, mais également, nous nous autofinançons parce que nous avons des activités génératrices de revenus. Nous avons par ailleurs d’autres financements comme Google, le département d‘Etat... Mais ça, ce sont des financements programmatiques.
Je ne crois pas que beaucoup de Sénégalais ont souvenance du parcours professionnel de Maktar Bâ. Dites-nous un peu qu’elles sont les medias où vous avez fait vos armes au Sénégal ?
En fait, moi je n’ai jamais travaillé véritablement dans les médias comme un journaliste. J’ai travaillé à la PANA dans les années 90 comme chargé de marketing et du développement. Après ça, j’ai travaillé à la BICIS (Banque internationale pour le commerce et l’investissement au Sénégal) comme directeur de la Communication, de la Publicité et de la Qualité. C’est après ça, que je suis allé aux Etats-Unis pour créer une plateforme qui s’appelle Allafrica.com qui est la plus grande plateforme sur le web en termes d’informations et de nouvelles sur l’Afrique en français et en anglais. Et depuis 2008, on a créé AMI que j’ai l’honneur de diriger à partir de Nairobi (Kenya)
Justement allafrica.com j’allais en venir. Comment va cette plateforme aujourd’hui. Il y a des entrées…
Allafrica se porte comme bien. Vous pouvez aller en ligne, vous verrez. D’ailleurs pour ce forum, il y a un gros contingent d’allafrica qui viendra de Washington, de Nairobi, de Cap Town, de Dakar bien sûr, pour couvrir l’événement.
Le challenge annuel de 1 million de dollars US que vous lancez depuis la création de AMI se déroule concrètement comment ?
L’idée c’est simple. C’est de dire quel sont les idées que vous, organes de presse, avez pour le développement des médias numériques. Nous avons simplement besoin que vous nous soumettiez vos idées… Une fois que vous nous soumettez vos idées, nous, nous avons un panel de juges qui va les évaluer. Et si vos idées sont retenues après cet examen, on va vous aider à les concrétiser, donc à les financer.
Réalisé par Frédéric Atayodi
(Source : Le Sénégalais, 7 novembre 2012)