Affaire Millicom-Etat du Sénégal : Le Cirdi ouvre la voie au Tribunal régional de Dakar
samedi 24 juillet 2010
Le débat autour de la validité du retrait de la licence de Sentel par l’Etat du Sénégal, pour lequel Millicom avait saisi le Centre international de règlement des différends liés à l’investissement (Cirdi), sera bientôt vidé par le Tribunal régional de Dakar. Ainsi en a décidé le Tribunal arbitral de la Banque mondiale, dans son verdict rendu, hier.
L’affaire qui oppose l’Etat du Sénégal au groupe Sentel-Millicom part pour connaître bientôt son épilogue. Car le Tribunal arbitral de la Banque mondiale, plus connu sous l’appellation de Centre international de règlement des différends liés à l’investissement (Cirdi), a rendu son verdict, hier, à Paris. Le dossier avait été enrôlé au mois d’avril dernier.
D’une part, le Cirdi a déclaré sa compétence à se saisir du dossier à la suite de la requête déposée par le groupe Sentel-Millicom. Ce qui veut dire que cette instance juridique de la Banque mondiale va pouvoir étudier le dossier en vue de trancher. D’autre part, l’instance juridique dit ne pouvoir « influencer le sort de la procédure ouverte devant le Tribunal régional de Dakar ». Laquelle procédure avait été initiée par l’Etat du Sénégal après l’expiration de la mise en demeure de renégocier le contrat fait au groupe Millicom. Seulement, cette procédure avait été arrêtée, car le Cirdi avait demandé au Tribunal de Dakar de surseoir à sa décision, le temps qu’il donne son avis sur la question.
« Elégance »
Aujourd’hui, le verdict donné par le Cirdi ouvre la voie au Tribunal de Dakar qui peut maintenant vider le dossier. Une situation qui sera, sans doute, bien accueillie par l’Etat du Sénégal. Parallèlement, la procédure de saisine du Cirdi par Millicom se poursuit.
Il faut relever, en effet, « l’élégance de l’Etat du Sénégal dans cette affaire, car ayant accepté d’attendre que le Cirdi se prononce. Une façon d’aider à faire valoir les droits de Millicom, tel que stipulé dans le contrat de concession alors signé avec les autorités du régime socialiste », fait remarquer le conseiller du président de la République en Technologie de l’information et de la communication, Thierno Ousmane Sy, joint au téléphone. Il se réjouit, par ailleurs, de « cette décision qui confirme que le Sénégal est un Etat de droit. Il y a beaucoup d’actions, mais nous avons préféré emprunter la voie légale : celle de la justice et du droit international. C’est ce qui fonde la saisine du Tribunal régional de Dakar. » De même, argumente-t-il, « c’est ce souci d’être toujours légaliste qui fait que l’Etat n’a pas utilisé la force pour la fermeture unilatérale des opérations de Millicom, suite au retrait de sa licence ».
Ce différend est parti de la licence de téléphonie que le groupe Sentel-Millicom avait acquise, en 1998, au prix de 50 millions de FCfa. Arrivé au pouvoir, le Président Abdoulaye Wade a dénoncé le contrat de concession et des manquements dans ce dossier. « Millicom n’avait pas payé ses redevances au 1er janvier 2000, Millicom avait violé ses obligations de fournitures d’informations techniques, administratives et financières, et il y avait des manquements quant à la couverture radioélectrique du territoire », avait accusé Me Wade. Ainsi, après plusieurs mises en demeure, l’Etat du Sénégal, par le biais de l’Agent judiciaire de l’Etat, a résilié la licence, avant de saisir le Tribunal régional de Dakar.
Informée du fait que le Sénégal prépare un appel d’offres pour un troisième opérateur, Milicom décide alors de renégocier sa licence en proposant 45 milliards alors que l’Etat demandait 200 millions de dollars (environ 100 milliards de FCfa). Devant ce qui était considéré comme un « dilatoire » de la part de Millicom, l’Etat a saisi le Tribunal de Dakar aux fins de déclarer la validité du retrait de la licence de Sentel. Celle-ci a aussitôt saisi, à son tour, le Cirdi, dont la décision tombée, hier, permet au Tribunal de Dakar de poursuivre la procédure.
Ndiaga Ndiaye
(Source : L’Observateur, 24 juillet 2010)