Abdoulaye Bill Diarra, concepteur de la plateforme « Mtick » : « Dans deux ans, nous voulons créer au moins une centaine d’emplois directs »
lundi 16 avril 2018
Après deux ans d’expérience en Côte d’Ivoire, la plateforme « Mtick » étend ses tentacules au Sénégal. Depuis le 8 avril 2018, cette solution d’achat de tickets en ligne est proposée aux Sénégalais. Son concepteur, Abdoulaye Bill Diarra, l’a présentée comme étant « un service d’achat de tickets à travers une multitude de canaux, téléphonique avec ou sans internet, sur mobile/smartphone et tablette. Cette solution innovante permet aux clients de gagner du temps, mais aussi de l’argent ».
Vous venez de lancer une plateforme dénommé Mtick au Sénégal. En quoi consiste-t-elle ?
Comme son nom l’indique, c’est un mobile ticket. « M » pour mobile et « Tick » pour ticket. C’est une plateforme qui permet de dématérialiser les tickets dans le but que les utilisateurs puissent s’octroyer de façon simple, concise et pratique un ticket pour voyager, aller regarder un évènement, aller regarder un match de foot ou une projection de film au cinéma. Et en parallèle, ça permet aux prestataires d’avoir un système d’information qui implique un suivi en temps réel sa clientèle.
Pourquoi avoir choisi le Sénégal, alors que vous étiez en Côte d’Ivoire ?
Je pense que le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont les locomotives de l’Afrique de l’Ouest. Parlant français et étant Sénégalais, j’ai toujours eu à cœur de faire quelque chose qui puisse bénéficier au plus grand nombre en vendant des tickets, mais aussi de créer de l’emploi et de la valeur. Aujourd’hui, il existe une problématique de l’envoi d’argent de la diaspora pour aider ou d’avoir certaines compétences, les ramener sur le pays pour les développer. J’ai commencé avec la Côte d’Ivoire parce que c’est le marché qui était le plus structuré et en termes de transporteurs, était beaucoup plus grand. Ce qui m’a permis de faire mes armes pour les répercuter au Sénégal, qui ira aussi très vite, car on aura bien compris comment le mécanisme fonctionnait en Côte d’Ivoire.
Quel bilan tirez-vous de votre expérience en Côte d’Ivoire ?
C’est un bilan assez mitigé, parce qu’on manque cruellement d’investissement et de visibilité. Aujourd’hui, le numérique n’est pas encore aux heures occidentales ; ce qui est dommage, car on a tous presque les même infrastructures. De nos jours, l’utilisation est totalement différente du digital, mais en termes de pénétration, l’Afrique a dépassé tous les autres continents, parce que tout le monde bénéficie d’un mobile. Le problème que nous rencontrons, c’est que notre cible n’est pas forcément sur le net. Elle est dans les gares, devant les portes de cinéma etc. Un certain effort de communication et de visibilité doit être fait moyennant les vecteurs de communication dont on dispose, que ça soit la télévision ou la presse écrite, pour pouvoir toucher et capter cette audience qui, dès lors qu’elle aura utilisé cette solution ou une solution concurrente, l’adopte automatiquement, parce que c’est vraiment une démarche de facilitation que nous proposons. Donc, le bilan reste mitigé, l’action est bonne, l’éducation est en cour, mais il y a un manque d’investissement pour pouvoir aller chercher cette clientèle qui est hors de la sphère digitale.
Quelles sont vos cibles ? Est-ce qu’il s’agit des compagnies de transport aérien, terrestre ou les promoteurs évènementiels ?
Il y deux types de clients : le client final qui utilise la solution et qui cherche à avoir un ticket bénéficie d’une plateforme qui regroupe tous les tickets et lui permet de ne pas se disperser de gare en gare, de salle en salle ou de station en station. Ceux-là, ce sont les 15 millions de Sénégalais, les 24 millions d’Ivoiriens… Ensuite, il y a un autre côté purement professionnel, ce sont les transporteurs, les promoteurs de lutte, les salles de cinéma, les artistes etc.
Est-ce que le marché du ticketing est bien organisé ? Y a-t-il du potentiel ?
Le marché a beaucoup de potentiel, parce qu’aujourd’hui on a besoin de tickets pour accéder à tous. Le potentiel est là, le marché est estimé en Côte d’Ivoire à plus de 120 milliards de francs Cfa. Au Sénégal, je n’ai pas les chiffres exacts, mais ça mérite au moins la moitié pour ce qui est du marché des transports. Les autres types d’activités ont aussi un besoin criard de tickets, mais ce n’est pas clairement régulé et l’objectif final de cette solution c’est de pouvoir aider tout un chacun à s’y retrouver, et puis qu’il y ait une régulation de ce secteur.
Avez-vous déjà signé des partenariats d’affaires avec des sociétés de la place ?
On est en pleine phase de prospection. Il y a déjà des transports avec lesquels nous travaillons, d’autres sur lesquels on a juste pour la proposition de vendre les tickets, mais on n’a pas de partenariat forcément direct. Nous travaillons aussi avec une salle de cinéma, nous avons des promoteurs qui sont intéressés. Aujourd’hui, on propose beaucoup plus, c’est-à-dire que le partenaire professionnel peut automatiquement entrer sur le site, renseigner les infos pour son tickiting et nous laisser faire le reste, c’est quelque chose d’assez ouvert, ce sont des Api (moyen de communication en technologie).
L’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) a-t-elle un droit de regard sur le marché du ticketing ?
Dans une certaine mesure oui, parce qu’on fait du service social valeur ajouté, soit on va proposer de l’Ussd, c’est un marché qui est en train d’être ouvert au Sénégal, on propose aussi des achats par sms. C’est l’Artp qui donne cet agrément-là. Donc, ils ont un droit de regard sur ce marché et tout ce qui est digital.
Avez-vous des objectifs à atteindre à court, moyen et long terme ?
Pour le court et le moyen terme, les objectifs à atteindre sont de faire les 100 premières ventes. Aujourd’hui, on commence à vendre tout doucement. Le fait que la clientèle adopte le produit est le premier objectif qui nous tient à cœur. Cela prouve la viabilité de notre solution. A moyen terme, c’est d’implémenter l’Ussd, mais de façon beaucoup plus rationnelle en termes de coût. Et à long terme, c’est la création de l’emploi. La première motivation de cette activité, c’est la création d’emplois et la facilitation de l’utilisateur. C’est de pouvoir aussi créer au moins une centaine d’emplois directs et des milliers d’emplois indirects dans une fourchette de deux ans.
Ce continent est à nous. Nous devons donc nous retrousser les manches pour pouvoir créer de l’emploi, parce que l’Afrique connaît un boom exceptionnel en termes de ressources humaines et de ressources naturelles. A nous jeunes entrepreneurs de créer et de l’emploi et de la valeur pour que les futures générations puissent bénéficier de services de qualité.
Propos recueillis par Dialigué Faye
(Source : Le Quotidien, 16 avril 2018)