ATDA 2021 : infrastructures et sécurité comme leviers de la souveraineté numérique de l’Afrique ?
vendredi 3 décembre 2021
« Infrastructures et souveraineté numérique, comment relever le défi ? Stratégie d’accélération du digital et cloud souverain en Afrique ». C’est le thème qui a été débattu lors du premier panel de la dixième édition des Assises de la transformation digitale en Afrique (ATDA), co-organisée par Cio Mag et la Commission nationale de contrôle de protection des données à Caractère Personnel (CNDP), en partenariat avec l’Université Mohammed VI polytechnique (UMP6) et l’Agence de développement du digital (ADD).
Ce premier panel du jeudi 25 novembre était constitué de Amine Kandil, fondateur et directeur général de N+ONE Data Centers, Lin Mombo, président du Conseil africain des régulateurs, Touhami Rabii, président de GEMADEC, Mehdi Kettani, directeur général DXC.CDG Maroc et Dr Raphaël Kouamé Koffi, directeur de la transformation digitale de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui intervenait par visio-conférence, sous la modération de Sinatou Saka journaliste à France 24 et RFI.
Dans sa communication axée sur les défis auxquels l’Afrique fait face en matière de souveraineté numérique, Dr Raphaël Kouamé Koffi a indiqué que le manque « d’infrastructures de connectivité et de localisation des données (Datacenters) » est le défi majeur du continent. A ces défis s’ajoute « la faible sécurité des infrastructures existantes ».
Revenant sur la leçon à tirer du Covid-19, le directeur de la transformation digitale de la CEDEAO a affirmé que la pandémie du Coronavirus a favorisé la pénétration d’internet en Afrique de l’Ouest, qui « a connu une forte croissance d’utilisation allant de 47 % à 56 % entre décembre 2019 et décembre 2020 ».
Les régulateurs face à la souveraineté numérique
Selon Lin Mombo, le rôle des régulateurs dans la promotion de la souveraineté numérique en Afrique est de veiller à l’application effective des règlements mis en place par les chefs d’Etats en matière de communications électroniques et porter l’innovation pour promouvoir les échanges entre les pays africains. Cette mission constitue le fer de lance de l’alliance Smart Africa qui vise à assurer un accès abordable « aux larges bandes et aux TIC, à travers la construction d’infrastructures de télécommunications africaines qui permettraient de connecter toute l’Afrique ».
De son côté, Mehdi Kettani, directeur général de DXC.CDG Maroc a axé son intervention sur le sens de la souveraineté numérique. Selon lui, la souveraineté n’est pas qu’une question d’infrastructure. “L’objectif c’est d’arriver à assumer. Il faut donc pouvoir établir des standards”, dit-il. Pour illustrer son point de vue, il s’est servi de l’exemple de son entreprise qui possède un Datacenter certifié tiers III à Rabat et qui est dupliqué à Casablanca pour assurer l’accompagnement de ses clients vers le cloud.
Un point de vue soutenu par Touhami Rabii, président de GEMADEC qui a orienté sa communication sur l’hébergement, la sécurité des données et la promotion de l’éducation numérique en Afrique. S’agissant de l’apport du secteur privé dans la souveraineté numérique, Amine Kandil, note que « le privé doit jouer un rôle de leader et de locomotive en partenariat avec le public pour rapprocher les solutions plus près des utilisateurs ».
Stratégies pour un cloud souverain en Afrique
Du premier tour de table, il ressort que les défis sont énormes en termes de souveraineté numérique en Afrique. Partant de ce constat, décideurs, chefs d’entreprises et gouvernements sont amenés à se poser plusieurs questions : quelles stratégies d’accélération du digital ? Quid de la mise en place d’un cloud souverain en Afrique ?
Tous les panelistes sont unanimes sur la mutualisation des forces entre Etats. « La solution est panafricaine. Cela implique la collaboration avec tous nos frères africains pour nous permettre de déployer cette souveraineté numérique de tous les Etats africains. On doit pouvoir construire des capacités à travailler ensemble sans être hyper dépendants », propose M. Kettani.
« L’Afrique à une population jeune. De ce fait, elle doit être utilisée au profit de la transformation digitale. D’où la nécessité de former les jeunes. L’Afrique doit s’unir pour définir une réglementation protectrice de ses données. Les Etats africains incluant les membres de la CEDEAO en ont pris conscience », déclare Raphaël Kouamé Koffi.
Pour sa part, Touhami Rabii propose la mise en place d’une stratégie de « financement des projets et d’attribution de marchés publics adaptée au contexte africain » en vue de renforcer la confiance mutuelle entre les pays africains. Cette piste est relativisée par Amine Kandil qui plaide pour « l’ouverture d’esprit et la collaboration entre les Etats africains et les Gafam ».
Cela dit, le continent africain est-il prêt pour mettre en place ces stratégies ? Lin Mombo note que la démonstration en est flagrante aujourd’hui avec tous les grands projets menés par l’lliance Smart Africa. « La confiance a été établie entre les pays africains. La formation au niveau des zones rurales, c’est-à-dire les gens doivent avoir un minimum d’instruction sur tout ce qui est mis à leur disposition pour faciliter la digitalisation ».
Les propositions susmentionnées sur l’accélération du digital et le cloud souverain en Afrique ont servi de conclusion pour ce premier panel qui a duré une heure et demie.
Enock Bulonza
(Source : CIO Mag, 3 décembre 2021)