Préambule
L’objectif de ce post est de susciter une réflexion sur le cadre réglementaire du secteur des Technologies, Médias et Télécommunications (TMT) au Sénégal. Que les acteurs, principalement l’Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP), prennent de la hauteur afin que collectivement nous puissions bénéficier des impacts positifs des avancées du secteur.
N’étant ni employé de Sonatel (Orange Sénégal), ni employé de l’ARTP ; je peux me permettre une certaine liberté de ton et un droit de regard en toute objectivité sans parti pris.
Contexte
Suite à une dégradation des services de Viber et WhatsApp au Sénégal, l’ARTP a demandé des explications (voir http://bit.ly/1B6iZLn) à la Sonatel . Même si, comme tout le monde, j’ai accusé Sonatel (sans aucun fondement, c’est le sport national ☺) la bonne foi devrait prévaloir. Leur orientation stratégique pour 2015 va à l’encontre de tels actes. Les questions que je me pose sont :
Quelle est la base légale de l’interpellation de l’ARTP (aspects du cahier de charge non respectés) ?
Quels sont les faits qui prouvent que la Sonatel aurait délibérément dégradé le service des ces applications tierces ?
Net Neutrality/Open Internet
La neutralité du net est le principe selon lequel l’accès aux applications et aux contenus devrait être fourni sur une base égale sans favoriser certains ou bloquer d’autres. Un principe qui sauvegarde le modèle d’affaires de toutes les parties prenantes (du service gratuit au service payant). Sans faire l’apologie de ce cadre légal, la mutation du secteur TMT impose des réformes. L’ARTP, de par sa mission, a le devoir d’impulser un cadre légal moderne à la hauteur des enjeux. Évoquer les subtilités et complexités d’un tel cadre n’est pas le propos de ce post ; toutefois l’enjeux sera au niveau de l’interprétation légale de l’article 6 du code des télécommunications adopté en 2011 (http://bit.ly/1M9GaJQ).
Principe égalitaire (Same Service, Same Rules)
Quel est le modèle de partage de revenus entre ces acteurs du net (Tango, Skype, Line …) et les opérateurs de téléphonie mobile (MNO) ? Quel est le rôle et la place du régulateur dans cette dynamique ? Comment préserver l’intérêt du consommateur ainsi que celui de l’état ?
Aussi, n’est-il pas contre les intérêts nationaux qu’une autorité (ARTP) fasse des annonces, avec en toile de fond un brin de suscipicion, qui peuvent ternir l’image de marque d’un des fleurons du tissu économique Sénégalais ? Quand on sait la contribution de cette entreprise est considérable (même si elle peut mieux faire…) au niveau des impôts et de la création d’emploi au Sénégal et dans la sous-région. WhatsApp (valorisé à 19 milliards USD) et Viber (valorisé à 900 millions USD) impactent peu sur la résorption du taux de chômage au Sénégal et ont une contribution négligeable sur les fonds du trésor public. L’autorité, par responsabilité, a le devoir d‘aborder ces problématiques dans toute leur complexité.
Le clash de deux modèles d’affaires différents est au désavantage des MNOs, qui investissent lourdement dans l’infrastructure (en conformité au cahier des charges et à la demande du marché). Sans aucun investissement sur l’infrastructure et sur le capital humain local ; la concurrence ne peut qu’être déloyale.
Tel que spécifié par les CEOs de Vodafone, Telefonica, Deutsche Telekom ; les régulateurs doivent trouver un moyen d’équilibrer la concurrence entre les opérateurs télécoms et les acteurs du net. Un véritable challenge, si on veut conserver (à juste titre) la gratuité pour le consommateur final. Dans ce contexte, le mot à la mode peut aider “innovation”.
Sonatel Open Business Model ?
Les réflexions sur les responsabilités de l’ARTP n’a pas pour dessein de “saintifier” la Sonatel, loin de la… Cet “événement” est un signal fort sur les attentes du marché et du niveau de maturité des consommateurs. Les clients veulent des services à très haute disponibilité et à moindre coût. Si la Sonatel (pour l’instant, en attendant des réformes) ne peut être légalement imputable du niveau de services des applications tierces utilisant ses plateformes, elle a toutefois le devoir social d’intensifier les transformations nécessaires afin d’être en phase avec les attentes du client. Un modèle d’affaire ouvert et transparent axé sur un monde digital en perpétuelle mutation. L’architecture d’un monde connecté (Internet of Things), de villes intelligentes (SmartCities), de gestion intelligente de l’empreinte énergétique (SmartGrid)… ne se fera sans une participation et une évolution de la Sonatel.
(R)évolution des plateformes
Finalement, nous attendons plus du régulateur, des opérateurs télécoms et des acteurs du net … Les enjeux sont ailleurs, il est temps d’opérer à une évolution en profondeur dans l’intérêt du consommateur final. Des réformes nécessaires ?
Lamine Sy
(Source : Medium, 4 mars 2015)