Avant de se retrouver ces derniers jours devant les limiers de la Division des investigations criminelles (Dic), l’ancien directeur de l’Agence pour la régulation des télécommunications (Art) avait été contacté par Le Quotidien pour donner son avis sur un certain nombre d’accusations portées sur sa gestion. M. Guèye n’avait pas esquivé les différentes questions. Malick Guèye a expliqué n’avoir géré la société que selon les termes du Code des télécommunications, et n’avait pas conscience d’avoir outrepassé ses prérogatives. Il avait même affirmé ne pas être au courant d’une quelconque enquête judiciaire dont sa boîte ferait l’objet.
Sur le système de passation des marchés, il avait été dit que le Dg de l’Art et son secrétaire général écartaient systématiquement le Conseil de régulation, chargé par les textes, de veiller à la régularité des appels d’offres. On disait même que, « pour gagner un marché de l’Art, il ne suffit pas d’être le mieux disant tel que disposé dans le code des marchés, il suffit tout simplement de verser une commission de 15% pour se voir attribuer le marché ». A cela, Malick Guèye a affirmé être le Dg qui a mis en application le Code des marchés publics à l’Agence. « Les gens disaient que l’on n’avait pas besoin d’appliquer les règles ; je n’étais pas de cet avis. Pour moi, l’application des règles est la meilleure garantie d’un Dg. Avant mon arrivée, il y avait deux ou trois personnes qui se réunissaient et décider du dépouillement d’un marché. J’ai mis fin à tout ça ». Il n’aurait donc jamais été question par conséquent de marché de gré à gré sous sa direction.
Véritable régulateur
Pour ce qui est de ses rapports avec le Conseil de régulation, il n’a pas manqué d’affirmer que ceux-ci ont toujours suivi l’esprit et la lettre des textes. Malick Guèye cite même de cœur l’article 13 du Décret portant organisation de l’Art, qui précise que « le Conseil de régulation se réunit, à la demande du directeur général de l’Art, pour délibérer sur un ordre du jour que lui soumet ce dernier ». Il assure que pour de nombreuses décisions, et dans de nombreux cas, la loi ne lui fait pas obligation de consulter le Conseil. Malick Guèye commente même : « En fait, contrairement à ce qui a été fait en France, le Directeur de l’Art est le véritable régulateur. En France par contre, c’est un petit groupe de personnes qui détient le pouvoir de régulation, et le Dg est plus une sorte de secrétaire exécutif, sans réel pouvoir. »
C’est par des réponses du même genre qu’il a évacué les accusations portant sur le marché de location du nouveau siège de l’Art, vers les Almadies. « Il y a eu un appel restreint, et le dépouillement a été fait en présence des membres de l’administration, et de la Commission nationale des contrats de l’administration. Même les frais des travaux d’aménagement ont été décidés en commission, le directeur n’a pas pris de décision tout seul. » Dans la même lancée, il assure que le montant des travaux à effectuer sur l’immeuble a été de 150 millions de francs Cfa, et non des 600 millions avancés. De plus, selon M. Guèye, le loyer de l’immeuble n’est que de 6 millions.
Argent du contribuable
Ses accusateurs avaient déclaré que « le loyer mensuel est de 8 millions 500, auquel il faut ajouter 4 millions pour la location d’un terrain nu contigu à l’immeuble du siège, dont la destination est d’accueillir le parking et le restaurant ». Se portant en faux contre les chiffres avancés, il dira pour sa part qu’il n’était que normal de chercher à rendre joli leur espace de travail : « Je ne suis pas de ceux qui veulent être chics sur leur corps, bien s’habiller et habiter une jolie maison, et qui travaillent dans des conditions exécrables. Je pense que les travaux que nous avons effectués ont plu à tous les employés de l’Art, qui en éprouvent du plaisir. Pour ce qui est du terrain qui sert de parking, sa location n’est que de 1,5 millions de francs Cfa. » Ses contradicteurs affirment pour leur part que « les termes de ces différents contrats sont totalement en défaveur de l’Art, car aucune stipulation contractuelle ne permet à l’Art de disposer d’un quelconque avantage à la fin des contrats ». Il en est de même des frais de réhabilitation qui peuvent être considérés, selon les accusateurs, comme « perdus, car en réalité, au terme du contrat de location, le propriétaire peut décider librement de reprendre son bien sans que l’Art n’ait à revendiquer quoi que ce soit. C’est l’argent du contribuable qui part en fumée ».
Malick Guèye n’a, à aucun moment, au cours de cette rencontre, reconnu avoir commis de faute de gestion, ni utilisé de manière gabegique les fonds de l’agence. A tout moment, il a affirmé s’en être tenu à ce à quoi l’autorisent les textes. Il explique ainsi ne pas être en mesure de justifier tout point de sa gestion. Comme, par exemple, sur le mobilier changé lors du déménagement : « Je pense qu’il doit être parqué quelque part à Yeumbeul, mais je ne sais pas au détail près de quoi il se compose. On ne peut tout de même pas demander à un Dg de s’occuper de détails de ce genre ! » Cela ne l’empêchera pas d’affirmer que lui n’a pas changé de mobilier. « J’ai conservé le bureau de mon prédécesseur, et c’est celui que j’avais jusqu’à mon départ. » De ce fait, M. Guèye a affirmé que sa gestion à la tête de l’Agence de régulation des télécommunications était, on ne peut plus « nickel », malgré tout ce que peuvent en penser certains.
Mohamed GUEYE
(Source : Le Quotidien, 7 juillet 2005)