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Lettre de politique sectorielle des télécoms : Le Oui-mais des opérateurs

vendredi 18 février 2005

De grandes ambitions sont affichées dans la Lettre de politique sectorielle (LPS) des télécoms. Mais l’absence de concertation avec les différents acteurs dans son élaboration fait que le document n’est pas approuvé par tout le monde. Surtout que, sur certains points, on note un manque de précision. Cela n’enlève cependant en rien la valeur de cette Lettre de politique sectorielle qui est importante pour le développement du secteur.

Dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), le Sénégal s’est engagé auprès des autres pays africains à prendre en charge la supervision du volet consacré aux nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Ce qui est logique surtout si on prend en compte l’extrême importance que revêt les Ntic aux yeux du chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade qui en a fait l’un de ses plus grands combats. Pour preuve, le Sénégal se bat depuis quelques années pour imposer le concept de solidarité numérique. Ceci afin que l’accès aux NTIC ne soit plus réservé aux seuls pays développés mais, que les pays sous développés puissent, eux aussi, bénéficier des merveilles des avancées technologiques. Et pour réussir ce challenge, un secteur des télécommunications où toutes les conditions à même de garantir le succès sont réunies, est pour le moins indispensable. C’est pourquoi des réformes de grandes envergures ont été déjà menées. Réformes parmi lesquelles on pourrait citer la décision du gouvernement de mettre fin, en juillet 2004, au monopôle de la Société nationale des télécommunications où l’Etat détient 27,67 % du capital. Une décision qui ouvrait déjà de nouvelles perspectives dans le secteur des télécommunications au Sénégal avant que, le 26 janvier dernier, la LPS ne vienne éclaircir davantage les ambitions que le gouvernement du Sénégal affiche pour ce secteur stratégique qui contribue à hauteur de 6 % au Produit intérieur brut (Pib) du Sénégal.

Dans la LPS consacrée au secteur des télécoms, une évaluation de l’existant a été faite. Et, on peut noter par exemple, qu’il y a un parc de 230 mille lignes de téléphone fixe et environ 800 mille abonnés pour le téléphone mobile, au 31 décembre 2003. Mais également, c’est plus de 1000 villages sur l’étendu territoire national qui sont connectés au téléphone, sur un total de 14 200 villages. Une numérisation complète du réseau téléphonique, de même qu’une évolution notables des services à valeur ajoutée et une forte croissance du trafic Internet, sont aussi constatées dans le document. L’ADSL fait aussi partie des grandes avancées du secteur avec son introduction au Sénégal en février 2003.

Cependant, en dépit de ces avancées très significatives, des constats majeurs ont été faits par le gouvernement et, ces constats sont loin d’être positifs. Par exemple, le gouvernement écrit dans la LPS avoir constaté l’absence d’une régulation effective pour définir les règles du jeu entre opérateurs et fournisseurs de services. Un monopôle faiblement régulé, une concurrence faible sur le mobile, un manque de transparence dans l’octroi des licences et l’attribution des fréquences font aussi partis des constats faits par le gouvernement dans la LPS. Des constats qui ne militent pas en faveur de l’émergence économique du Sénégal. Ainsi, malgré des acquis non négligeables, beaucoup de travail reste à faire. Et dans ce cadre, le gouvernement s’est fixé un certain nombre d’objectifs et a défini les voies et moyens pour les atteindre.

L’accroissement de l’offre de service et la facilitation de l’accès aux services de télécommunications et de l’information au plus grand nombre d’usagers surtout en milieu rural est visé par le gouvernement dans cette nouvelle politique. Le parc téléphonique qui était de 1 million en 2003 devrait, selon la LPS, être porté à 3 millions dans 3 ans, c’est-à-dire en 2008. La desserte rurale doit aussi être améliorée et il est prévu un raccordement de plus 9500 villages d’ici à 2008 et la totalité des villages centres soit 14 200 à l’horizon 2010.

La disponibilité d’un réseau de communication fiable et la répartition de manière équitable de la valeur générée par le secteur des télécommunications entre les usagers, les producteurs et l’Etat en vue d’optimiser la croissance du secteur et de favoriser de meilleures services à des prix compétitifs, font aussi parties des nombreux objectifs que s’est fixé le gouvernement dans la LPS. Pour réussir dans ce vaste chantier, des réformes seront entreprises par l’Etat, notamment à travers, entre autres, l’élaboration de textes législatifs et réglementaires, une régulation sectorielle beaucoup plus efficace, avec un renforcement des compétences de l’ART et l’ouverture des marchés de télécommunications à la concurrence. En effet, prochainement, une troisième licence globale sera octroyée au terme d’un appel d’offre international, à un nouvel opérateur.

Des notes discordantes

A propos de l’élaboration de la LPS, les avis restent partagés. Si pour certains ils ont été associés, pour d’autres, il n’y a eu aucune consultation préalable des acteurs du secteur. Pour ces derniers et à en croire les consommateurs, on déclare n’avoir pris connaissance du contenu de cette lettre que le 26 janvier dernier, lors de sa présentation à la presse, alors qu’elle avait été déjà adoptée par le conseil des ministres. Du côté des consommateurs, le président de l’Ascosen, M. Momar Ndao pense qu’il y a un manque de volonté de la part du gouvernement. Et même s’il ne remet pas en cause toute la LPS, il note que cette dernière est bien silencieuse sur beaucoup d’éléments qu’il juge très importants. En effet, pour lui, à écouter le ministre des Télécommunications lors de la présentation de la LPS, le cahier des charges qui doit régir l’octroi de la troisième licence est un four tout. Pour répondre à certaines questions posées par l’assistance à cette occasion, le ministre a toujours fait référence à ce document. Cependant, le président de l’Ascosen s’accorde avec le gouvernement sur certains points. Ces points ont trait à la concurrence qui n’est pas suffisante, raison pour laquelle les prix ne baissent guère. M. Ndao soutient que l’offre de service n’est pas suffisante, le taux de présence de l’ADSL est trop faible, à son avis. Et il souhaite une amélioration très sensible de la qualité du réseau mais, manifeste une opposition catégorique quant au souhait de l’Etat du Sénégal de se désengager du capital de la Sonatel. D’ailleurs, au niveau même de la Sonatel, on affirme que rien n’est moins sûr. On se base tout simplement sur le fait que l’Etat, dans la LPS, se propose d’étudier les options relatives à son désengagement partiel ou total du capital de la société.

A Sentel, même si on déplore le manque de concertation qui devait aboutir à la LPS, l’on partage cependant les constats fait au niveau de ce document. Notamment concernant l’absence d’une régulation effective à même de garantir les règles du jeu qui se décline en l’assurance d’une concurrence saine et loyale entre opérateurs. Saer Niang, le directeur des Ressources humaines et de la réglementation du deuxième opérateur sur le mobile, en l’occurrence Sentel, déplore l’existence de conflits réels entre les deux opérateurs qui ne sont pas arbitrés. L’interconnexion entre les opérateurs ne fonctionne pas parce que, selon M. Niang, la Sonatel refuse, depuis un an, d’accomplir ses obligations contractuelles et doit à Sentel plus de 7 milliards de F Cfa. Et, à en croire toujours M. Niang, l’ART saisie de cette question depuis huit mois, tarde à réagir. C’est pourquoi, soutient-il, dans ce contexte, il voit mal un autre opérateur venir investir dans un marché qu’il qualifie de jungle où les faibles sont à la merci des plus forts à cause de l’absence d’une régulation effective de la part de l’ART.

Mais, ce n’est pas le même son de cloche au niveau de la Sonatel, l’opérateur historique. Karim Mbengue, le directeur de la communication soutient que la Sonatel a participé aux concertations et a fait part de ses points de vue à cette occasion. C’est pourquoi, il voit en la LPS une excellente chose pour laquelle la Sonatel se réjouit, d’autant que l’Etat y affiche de grandes ambitions pour l’horizon 2008. La séparation des fonctions de régulation et de réglementation prévue dans la LPS est saluée par la Sonatel. En effet, pour son directeur de la communication, cette mesure va permettre à l’ART de s’occuper uniquement de régulation, ce qui allégera sensiblement sa tâche. Et d’ajouter, cette séparation traduit également la forte volonté de l’Etat du Sénégal de mettre en place une bonne régulation avec une ART forte, doter de tous les moyens dont elle aura besoin pour accomplir convenablement sa mission.

Troisième opérateur ou duo-pôle intelligent

Concernant l’octroi de la troisième licence, le directeur général de Sentel M. Matjas Sawodnik explique que sa société est prête à déposer sa candidature. Pour lui tout dépendra des conditions qui seront posées. Parce que, souligne-t-il, au niveau de Sentel, tous les moyens nécessaires pour la gestion d’une licence globale sont disponibles. Cependant si M. Sawonik déclare que sa société est prête à concourir lors du lancement du prochain appel d’offre international pour l’attribution d’une troisième licence, il soutient que le gouvernement aurait pu maintenir ce qu’il a appelé un duo pôle intelligent. Pour lui l’objectif de baisser les prix serait aussi atteint dans ce cas de figure puisque soutient-il, le Sénégal a les prix les plus bas en Afrique de l’Ouest. Il aurait fallu tout juste, selon lui, que l’ART actionne les bons leviers. Matjas Sawodnik pense que le Sénégal n’a pas besoin d’un troisième opérateur pour que les prix baissent. Pour lui, s’il y a un troisième opérateur, la rentabilité des deux opérateurs va baisser et il se pose la question de savoir si cela ne va pas à l’encontre des objectifs du gouvernement en matière de développement du secteur des télécommunications. Pour le Dg de Sentel, l’octroi d’une troisième licence n’est pas la meilleure option. Il faudrait plutôt, pour lui, accompagner les opérateurs existants pour devenir des opérateurs ouest africains. Et le Dg de Sentel de donner l’exemple d’opérations de la même nature qui n’ont pas été couronnées de succès dans d’autres pays de la sous-région ouest africaine comme le Bénin et le Burkina faso.

Du côté de la Sonatel on déclare s’être préparé à cette situation depuis très longtemps. Et M. Mbengue de préciser qu’ils ne resteront pas les bras croisés. Ils ne nourrissent aucune inquiétude à ce propos. Puisque selon lui, il y aura certainement une baisse des parts de marché pour les opérateurs mais cela ne signifie pas une baisse des profits pour les opérateurs. La seule chose que l’on souhaite au niveau de la Sonatel c’est que les règles du jeu soient claires et précises.

Les freins à la régulation

Le diagnostic posé dans la LPS est très sévère en l’encontre de la régulation. Mais, une précision s’impose. En effet, ce diagnostic est antérieur à l’existence de l’Agence de régulation qui n’a commencé à fonctionner qu’en 2002. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle sur certaines questions, l’ART est pratiquement impuissante. C’est le cas par exemple des licences octroyées aux deux opérateurs qui sont déjà sur place à savoir Sentel et Sonatel ou certaines précautions n’ont pas été prises par l’Etat. Ceci fait que les failles constatées dans la qualité du réseau sont difficilement gérées par l’ART, comme ce fut le cas récemment avec la Sonatel. Dans les cahiers des charges que ces opérateurs ont signés avec l’Etat, il y a beaucoup de manquements. C’est pourquoi, il est extrêmement important, selon le Dg de l’ART, que ces manquements soient corrigés. Surtout que le cahier des charges pour la nouvelle licence va prévoir beaucoup de choses qui ne figurent pas dans les précédents cahiers des charges. Donc une harmonisation s’impose pour que le prochain opérateur ne soit pas désavantagé et que la concurrence puisse se faire de manière saine et loyale. La Sonatel déclare être prête à discuter avec l’Etat des modalités de repréciser les règles qui vont régir cette nouvelle situation. Dès lors, les sanctions qui seront prévues pourront être appliquées par l’ART et contre tout le monde, et de manière égale.

Dossier réalisé par Aliou Kane NDIAYE

(Source : Nouvel Horizon, 18 février 2005)

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