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La privatisation des télécommunications

vendredi 11 février 2005

La mondialisation libérale telle que nous la côtoyons tous les jours a été construite par des décisions politiques. Cependant, sa propagation a été rendue possible par l’avènement d’un outil : les télécommunications. Cet outil construit jour après jour un monde dans lequel l’information ne connaît plus de frontières : « La société de l’information (SI) ».

Cette SI devrait ainsi permettre à quiconque, quelque soit son emplacement géographique, d’accéder aux ressources culturelles et informatives du monde entier, et de permettre à quiconque, quelque soit son emplacement géographique, d’accéder aux ressources culturelles et informatives du monde entier, et de permettre aux populations les plus enclavées d’accéder au savoir. De même, cet outil pourrait avoir le pouvoir -dans une certaine mesure-, de faciliter le développement des pays du Sud. Cependant, la mondialisation libérale s’approprie cette technologie au dépend des peuples, en la modelant à son image.

Ainsi, les télécommunications, biens communs de l’humanité (car mises en oeuvre par le secteur publique), sont actuellement fortement convoités par les investisseurs privés qui voient dans ce secteur une poule aux oeufs d’or incontournable. Les uns après les autres, les opérateurs publics sont privatisés, engendrant la recherche du profit maximal alors que la télédensité¹ n’est encore que de l’ordre d’un petit 1%. Mais pourquoi ces opérateurs publiques sont-ils privatisés ? Quels sont les conséquences dans les pays en voie de développement (PeD) ? Et dans les pays du Nord ? Le secteur des télécommunications dans des PeD comme ceux d’Afrique demande une analyse particulière. En effet, les difficultés économiques que connaissent ces pays se répercutent de manière non-négligeable sur l’ensemble des services publiques essentiels comme l’école, l’eau potable, la santé, mais aussi sur les télécoms. Les réseaux téléphoniques sont généralement très peu développés, et pas forcément en très bon état. Cependant, dans bien des pays (Sénégal, Ghana, Ghinée, ...) ce service publique était un des seuls à rapporter de l’argent à l’État. Si je dit « était », c’est parce que ces pays ont subi une privatisation partielle ou totale de leur opérateur historique. t en abuse pour forcer la libéralisation de nombreux services publics. Quitte à rompre à la règle, je commencerai par un contre exemple : le Sénégal. La privatisation de l’opérateur national (SONATEL, racheté par France Télécom) a permis une augmentation de la couverture de la population en mobile et fixe (5,3% de la population a un abonnement au téléphone). Cependant, la SONATEL était déjà le meilleur opérateur africain avant la privatisation. Finalement, la privatisation a eu pour conséquence de supprimer une grande part des revenus de l’État, au profit de FT qui cherchait à rembourser ses dettes. L’exemple du Sénégal est cependant un cas exceptionnel en afrique. En Afrique du Sud, suite à la privatisation, 500 000 lignes ont été déconnectés. Les exemples sont tous différents, et tous aussi aberrants [1].

Dans le cas d’un pays du nord comme la France, où le réseau a pu se développer grâce à une logique de service publique et à un protectionnisme du marché, le problème se pose légèrement différemment. En effet, France Télécom (FT), opérateur historique, possède un réseau téléphonique de qualité couvrant la totalité du territoire. L’accès minimal au réseau téléphonique est donc assuré pour tous, quelque soit l’emplacement géographique. Certes, le GSM et le Haut-débit ne sont pas encore aussi bien développés, mais cela peut s’expliquer en partie par le passé récent de FT. D’ailleurs, intéressons nous une minute à ce passé. Jusqu’en 1996, FT était propriété exclusive de l’État. L’opérateur jouissait alors d’un monopole sur le réseau et sur les services téléphoniques, sur tout territoire français. La mission de service publique des télécommunications était une de ses propriétés intrinsèque. Son implantation à l’étranger était essentiellement limité à quelques anciennes colonies. En 1996,le capital de France Télécom est ouvert aux investisseurs privés. L’entrée en bourse de FT (orchestrée par le gouvernement Juppé, puis repris par Jospin) a pour but de « supprimer les contraintes » qui l’empêcherait d’approfondir son alliance au niveau mondial avec Deutsche Telekom et avec Sprint. Cependant, l’État reste actionnaire majoritaire, cela pour éviter -en théorie- une prise de contrôle par les intérêts privés, et donc une rupture de la mission de service publique. A l’ouverture du capital suit l’ouverture du marché des télécommunications le 1er janvier 1998 (sauf téléphonie locale, arrivée tout récemment). Comme pour de nombreux autres services, une directive européenne (fortement inspirée par l’AGCS de l’OMC) incite les états membres à ouvrir à la concurrence leur « marché » des télécommunications. La répercussion directe de cette mise en concurrence des télécoms sur le territoire français à été, pour FT, la perte d’une part de ses revenus. La moitié du capital étant devenu privé, la recherche de rentabilité et de profit a obligé FT à chercher à compenser ces pertes par un développement démesuré à l’étranger. Cette expansion a placé l’ex entreprise nationale dans une logique de prédation et de concurrence féroce sur le marché international. Ses diverses acquisitions (Orange, licences UMTS, ...), souvent réalisées à des prix exorbitants, ont enfoncé FT dans une dette de 70 milliards d’euros en 2002. Sans compter la détérioration de la situation pour les salariés (précarisation, pression accrue, suppressions de postes etc...), la nouvelle situation de FT a eu une répercussion sur les usagers non négligeable. Par exemple, l’argent dépensé pour le remboursement de la dette et pour les dividendes des actionnaires (3 Milliards d’euro depuis l’entrée en bourse) aurait pu permettre d’étendre la couverture en GSM et Internet Haut-Débit à tout le territoire français afin d’assurer au mieux l’égalité d’accès au service public des télécommunications. Que ça soit au Nord comme au Sud, la privatisation des télécoms n’est pas une avancée pour son développement. La libéralisation des marchés, sous son aspect séduisant pour le consommateur, n’a d’intérêt que pour une partie d’entre eux : les plus gros, aptes à bénéficier de tarifs sur-mesures. Livrer le secteur des télécommunications aux lois du marché nous condamne à ne plus pouvoir imaginer son rôle hors de la logique marchande, supprimant ainsi toute perspective de son rôle social croissant pour lequel tout est à imaginer.

Pierre Dinh-van

(Source : ATTAC Campus, 11 février 2005)

[1] Pour plus d’informations : http://csdptt.org

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